Lire procure une réelle sensation, celle d’appartenir à un autre monde, celui d’intellectuel, le temps d’une lecture. Lire des livres riches en expressions, en mots nouveaux, forgent notre propre expression, façonne notre intellect, renforce notre langage, celui du quotidien. Lire nous aide à une meilleure analyse des choses, une meilleure compréhension. Il est conseillé de lire de bons auteurs, mais encore de grands auteurs. Et le Cameroun en possède, et je me suis fait le devoir de lire exclusivement, pour le moment, les auteurs Camerounais; de partager leurs écrits qui ne sont jamais éloignés du vécu quotidien. Et de pouvoir faire d’une pierre deux coups, à savoir, parler de littérature et de faits actuels de société à travers le regard d’un écrivain. Pour ce mois de février; pour Un mois, Une lecture, je vous propose cette œuvre de Calixthe Beyala, très enrichissante sur le plan de la culture, du vocabulaire, d’expressions ; mais aussi sur le fond, quand au sujet traité. Bonne lecture.
À l’entame de son ouvrage, Calixthe Beyala nous présente deux protagonistes qui vont constituer l’ossature de son œuvre. Deux personnages clés à savoir Boréale, la nièce de M’am Dorota, qui venait de convoler en juste noce avec un vieillard fortuné vivant à Bonanjo, quartier huppé de la ville de Douala alors que rien dans la vie ne la prédestinait un tel destin, tant elle avait connu des déboires avec les hommes. Mais c’était sans compter avec sa bonne étoile, ou dois-je dire avec « le temps » qui n’est autre que « l’autre nom de Dieu »; le roman décrit à ravir les déceptions dont peuvent être victime de nombreuses femmes. Oui, qui plus est si elles ont le malheur de tomber entre les bras d’hommes mariés. Leur ventre est un océan de mensonge, de fausses promesses qu’ils débitent tous tel un « hymne national ».
Que faire, que dire lorsqu’une femme a devant elle un homme aux paroles mielleuses, et qui vous humilient par après? juste croire et s’attendre à sa bonne étoile comme M’am Dorota, ou alors mettre son coeur en « congés maladies » comme Boréale, libre à chacun, selon son vécu. Il est d’autant plus vrai que, certains dans la vie, la subisse plus que ne la vive. Ils survivent au quotidien, s’accroche au peu d’espoir qui peut s’offrir à eux, surtout lorsqu’on est comme Boréale, issue de famille indigente. AÀ ce moment, l’amour n’a pas droit de cité, au contraire tout ce qui permettra de sortir de la galère est bienvenu, quitte à bafouer certaines valeurs morales comme on le voit par la suite.
Malheureusement et trop souvent, lorsqu’une femme vient à être déçue ou blessée par les circonstances de la vie notamment par les hommes , il arrive qu’elle rejette sa frustration sur l’enfant qu’elle porte, d’autant plus si il n’était pas désiré, et que dire si cet enfant a eu le malheur de briser ses rêves de future épouse. Boréale en a malheureusement fait les frais. Sa mère lui vouait une haine sans nom, car disait-elle, elle l’avait empêcher de convoler en juste noce. On ne peut pas juste dire qu’il s’agisse là d’une fiction, bien que ce soit le rôle du roman, mais dans la réalité cela existe bel et bien. Le rejet est total. Les mots, les gestes dont peut faire usage la maman qui se sent trahie sont d’une violence inouïe. Et Boréale, l’explique à son tour, elle n’a pas de désir d’enfants, elle ne souhaite pas en porter, car sa mère, durant longtemps, lui a fait porter les échecs de sa vie. Comment pouvoir envisager un foyer, une vie de famille, si on vous a fait croire pendant longtemps que vous étiez un fardeau.
Dans ces moments difficiles, il arrive que la Religion devienne l’abri de certains, non pas qu’en soi cela soit mal, mais l’usage que certains en font, porte à croire qu’ils sont dans l’erreur absolu, tant ils agissent comme n’ayant plus de raisons
Et Calixthe Beyala mentionne d’ailleurs cela dans son oeuvre avec ces mots assez crus: « Les nègres déjà assez cons » pour les abrutir une fois de plus avec la religion. En effet, on le voit de nos jours, tels des mouches qui pondent des asticots, ainsi se créent des églises au Cameroun. De nombreux prophètes y font leur beurres. Ils s’engraissent tels des vaches prêtent à l’abattoir. Les grâces leurs sont réservées, la richesse est dans ce milieu la chose la moins partagée par les « prophètes ». « Comme[…] Saul de Tarse l’illuminé de la route de Damas », nombreux sont devenus prophètes par un malheur de circonstances après avoir été de « toutes les débauches ». Le Chômage à conduit de nombreuses personnes vers les ordres, d’autres l’appât du gain facile comme on peut le lire dans l’ouvrage fut leur principale motivation. La religion en Afrique occasionne de véritable ravage. Ce d’autant plus que des doutes s’installent quand à la puissance et la richesse ostentatoires de certains . Par ailleurs, en Afrique, la question de la religion divise profondément. Entre les pourfendeurs des traditions africaines et les activistes de la foi, le combat est rude, ce d’autant plus que la religion s’assimile facilement en Afrique à la colonisation. Une colonisation qui a permit la traite des noirs, ou l’esclavage pour ne citer que cela. On le voit d’ailleurs, cela occasionne des conflits à Kassalafam, zone de promiscuité, quartier à risque, dans la ville de Douala.
Dans l’ouvrage ce conflit de quête de spiritualité ce joue entre le prophète et Homotype , le briseur de coeur de Boréale; qui représentent ces deux dualités. Cette idée selon laquelle en Afrique on pense plus à la prière, sans y associer le travail est forte. Surtout lorsqu’on voit comment certains pensent pouvoir acquérir la richesse et la prospérité occidentale sans fournir un effort quelconque, pensant que cela leur tombera du ciel, comme au temps de la manne. cela a de quoi nourrir une forme de doute et de scepticisme à l’égard de ceux qui n’ont pas une foi assez solide et de ces nouvelles églises. Or ce que l’on oubli trop souvent de dire, malheureusement, c’est que Dieu, celui que certains célèbrent avec un esprit de paresse a travailler durant 06 jours, et le 07 e jours il se reposa.
Alors une fois qu’on a en nous ce détail, comment comprendre que d’autres se laissent aller en croyant qu’en délaissant son travail, son pain, on connaitra prospérité et grenier abondant ? Cet ouvrage remet en question notre vision de Dieu en critiquant sans jeu de mots notre manière de le louer, de l’adorer. Serions-nous entrain d’avoir la foi sans les œuvres ? apparemment oui, car combien voit leur mariage s’écrouler et ne font rien, croyant que seul la foi aidera ? combien prie pour une voie excellente dans leur vie, mais ne font rien dès lors qu’une opportunité se présente à eux ? combien demande un mari, mais vivent encore dans la débauche ? un travail et ne dépose pas de CV ? la réussite dans leur affaire et ne prenne pas le temps de s’en occuper tel la prunelle de leur yeux ? Et pensent que à la seule puissance de la prière, tout se fera ? N’est-ce pas là une erreur? Je m’interroge.
Tout cette narration se déroule dans la ville de Douala. La ville de Douala y est décrite dans toute sa splendeur, suivez mon regard, on y trouve de tout, de la prostitution, au tocsin des véhicules, en passant par les veillées ou nuit de prière à chaque coin de rues ; Douala est un véritable capharnaüm. Les maisons closes, loin des critères occidentaux avaient tout de même leur part de « maquerelles » qui veillaient au grin; Mme Bolo Achao était l’une d’elles, elle tenait d’une main de fer sa maison close où chaque homme de Kassalafam et de ses environs pouvait venir étancher leur libido. Un bordel qui donne ainsi du grain à moudre aux prophètes des temps modernes qui ne manquait pas de professer toutes formes de malédictions au nom de Dieu pour que ces bordels prennent fin. Ce qui est d’autant plus amusant dans cette œuvre, c’est qu’on peut lire avec quelle aisance chacun tire profit des « Saintes écritures » pour justifier son entreprise quelqu’elle soit; Mme Bolo, le fait, le prophète également. Un véritable jeu de ping-pong pour qui fera capituler l’autre en premier. C’était cela Douala, « la ville de tous les vices et des chimères ».
C’est sur cette dernière phrase que j’achève ce bref résumé de la lecture du mois tiré du roman de l’auteure Camerounaise Calixthe Beyala. Mais qui est le Christ au juste ? s’agit-il uniquement de religion ? de ce Christ rédempteur ou alors d’autres choses. Je l’ai lu en une traite,j’imagine que telles sont les caractéristiques d’un bon roman, tant le supens vous tient en haleine. On ne souhaite qu’une chose découvrir la fin de l’histoire, et quel ne fut pas mon étonnement à ce moment là. De bons auteurs Camerounais, il en existe, et je me plais à partager avec vous leurs œuvres en espérant vous inciter à les découvrir. Dois-je vous présenter cette auteure ? je ne pense pas, si oui, il suffit juste d’avoir accès à wikipedia, pour savoir de qui il s’agit.
Je vous partage ces quelques mots et expressions qui ont attiré mon attention durant ma lecture.

Bonne lecture à vous
Quelques mots et expressions pour le vocabulaire :
– Matrice en métayage ; – macaquerie ; – marigot du négrille ;– macadam,
– chariboter ; – boudiner ; – verbiager ; – desamarrer ; – baratter ; – borborygmes ;
– aguerrie à la chose sexuelle ; – couinements des entrailles ; – la tige sucrée de ses mensonges ;
– mortifie mes sentiments ; – le malheur des femmes gisait souvent entre les cuisses d’un homme ;
– pétarader ; – les affaires périclitaient ; – ravauder ;
– aimer un incurable coureur de jupons,c’est avoir le même destin que la femme d’un truand ; – rebuffades
Source : Marc Ghislain, social media Cameroun